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Mère et fille, un duo qui grandit ensemble

PLAINES D’ÉTÉ – Un lacet dans un œillet12 juillet – Croix du Bac-Steenwerck

La première du spectacle Un lacet dans un œillet a eu lieu le mercredi 12 juillet à Croix du Bac. Cette lecture-spectacle alterne moment d’émotions et passages drôles sur la relation complice de Mam et de Môm.

Pour son nouveau spectacle, L’Embellie Cie a choisi un lieu inhabituel : une église. Plus précisément l’église de Croix du Bac. Ce hameau de 350 habitant·es, qui dépend de la ville de Steenwerck, est chargé d’histoire avec un cimetière militaire britannique datant de la Première guerre mondiale et l’église Notre-Dame des Sept Douleurs financée au XIXe siècle par les habitant·es. Cette église est un lieu de spectacle idéal avec ses grands vitraux rose, bleu et jaune, ses boiseries, ses voûtes, ses grandes colonnes et ses vingt-sept statues de dévotion aux saints populaires. « Le curé est très sympa et ouvre son église à la culture », précise Céline, 34 ans, une habitante du hameau. « Le Centre André-Malraux d’Hazebrouck fait régulièrement des spectacles dans cette église », complète Jean-Pierre, 73 ans, également résidant de Croix du Bac. « Le cadre se prête bien pour une proposition artistique car il permet une belle écoute. »

La trame du spectacle Un lacet dans un œillet est simple : il s’agit de l’histoire de Mam et de Môm, sa fille, l’histoire d’une mère pleine de mystères et d’une étrange enfant qui grandit à toute vitesse. Écrite par Sarah Carré, cette lecture-spectacle, pour un public à partir de 7 ans, est mise en scène et en espace par Sophie Mayeux. Cette proposition est interprétée par Lumîr Brabant (Môm) et Florence Masure (Mam), que nous avons déjà vu cette saison dans un autre spectacle du dispositif Plaines d’été : À quoi ça sert un livre ? écrit et mis en scène par Aude Denis.

Pour la première de l’impromptu Un lacet dans un œillet, le mercredi 12 juillet, l’église de Croix du Bac permet d’installer parfaitement les éléments de décor : deux grands poteaux en bois comme d’immenses aiguilles à tricoter en fond et un espace scénique délimité par une grande tresse de laine rouge. Ces éléments rappellent l’enfance, la maternité, la chaleur, le confort. Ce sont ces thèmes que les deux comédiennes vont développer tout au long de cette lecture. L’entente entre elles-deux est immédiate, évidente, avec des gestes tendres, des regards complices, des mots échangés. Les deux personnages s’amusent, se questionnent et se répondent, dialoguent sur la vie et les sentiments. Mam et Môm font les folles. Les spectateurs écoutent et sourient.

La prestation de Lumîr Brabant est particulièrement remarquable. En jouant une enfant qui grandit au fil du spectacle, elle dévoile tout son talent. Elle parle fort pour jouer avec la réverbération naturelle de l’église, elle danse sur elle-même, elle fume une fausse cigarette pour jouer à l’adulte. Elle essaie aussi de mettre les lacets de ses chaussures, assise sur une chaise : elle hésite, s’impatiente, s’énerve, se reprend, s’applique et réussit. La scène est drôle et tellement juste.

Môm s’amuse également à maquiller Mam et cela déborde de partout. Cette séquence fait particulièrement rire les enfants présent·es dans l’église. Pour cette représentation, il y a une trentaine de spectateur·rices : un public très varié, avec des enfants, des adolescent·es, des adultes et des seniors. Céline est enthousiaste : « C’était un spectacle autant pour les parents que pour les enfants. Un spectacle vraiment pour tous les publics, ce qui est rare, et il y avait autant d’enfants que de parents dans la salle ». Une petite fille s’échappe d’ailleurs des bras de sa maman, traverse la scène et vient doucement perturber le spectacle. Sa mère lui court après et l’attrape. Les spectateur·rices sourient de ce moment inattendu.

Le fil du spectacle reprend, avec différentes séquences. Après la scène du maquillage et du démaquillage, Mam lit maintenant et interprète l’histoire Les Trois petits cochons à sa manière. Elle joue avec deux pelotes de laine pour mimer les cochons. Puis Môm grandit. De petit enfant, elle est devenue adolescente, jeune fille, et sa mère adopte un ton plus dur avec elle. On ressent une période de tensions entre elles. Puis elles fument ensemble, toujours complices.

Il est temps maintenant pour Môm de quitter le cocon familial. Dans la scène finale, les deux comédiennes rassemblent la longue tresse de laine rouge. Elles rigolent d’ailleurs de ce poteau récalcitrant qui les empêche d’agir vite. Puis Môm s’entoure de cette laine et se met à danser alors qu’une musique rythme ce moment. Dans cette ultime séquence, la douceur de la laine est le dernier refuge de cette enfant qui a grandit et qui va s’envoler de ses propres ailes. Comme point final de ce spectacle encore tout frais, Mam glisse à Môm : « File, le monde t’attend ! ».

Après la proposition, les spectateur·rices sont enthousiastes. « C’était génial, je ne m’attendais pas du tout à ce type de spectacle », se réjouit Céline. Stéphane, 40 ans, est venu avec son fils Jules, âgé de 7 ans. « C’était bien, avec en plus des passages rigolos », raconte Jules. « Les comédiennes étaient bizarres, elles se faisaient des blagues. J’ai aimé aussi quand une comédienne lit Les Trois petits cochons, mais elle a changé l’histoire à sa manière. » Aussi emballé que son fils, Stéphane précise : « Nous allons voir parfois des spectacles à Merville, à Hazebrouck et même à Lille. Là, c’est top, c’est gratuit et c’est à côté de chez nous. Nous habitons juste en face de l’église : nous étions obligés de venir ! » Jean-Pierre est ému : « C’est un spectacle riche en sensations, très humain, très sensible. Émouvant. Ce spectacle amène beaucoup de réflexion sur la vie, la famille, les enfants. ». Puis il glisse avec un sourire : « J’étais instituteur à Nieppe et l’auteure du spectacle, Sarah Carré, a été mon élève. Maintenant je suis son parcours dans l’écriture et dans le théâtre ».

Après la représentation, un concert démarre en plein air, dans le jardin de la médiathèque juste sur le côté de l’église. Le groupe Dur Dur Dimanche va emballer la fin de l’après-midi avec ses morceaux rock festifs et cuivrés. C’est l’heure de l’apéro et une bonne partie des spectateur·rices de l’impromptu dans l’église reste pour profiter de ce moment musical estival.

Texte : Olivier Pernot
Photos © Olivier Pernot

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