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Jeux de mains dans un théâtre de poche

  • Oise

Pour trouver le Jardin des partages, il faut quitter le Mesnil Théribus, un petit village aux portes du Vexin, serpenter jusqu’aux Landes et enfin, au bout d’une impasse, se dessine cet îlot de verdure où se retrouvent, chaque week-end, amateurs et amatrices de jardinage, de maraîchage et de nature. En ce samedi 3 septembre, s’y pressent aussi des amateurs de culture, curieux du spectacle proposé par la compagnie des 100 Mobiles

Entre 10 heures et midi se jouera chaque demi-heure le spectacle Entre deux bonnes mains, écrit et mis en mains par Manon Descamps et David Crevet. Sauf qu’il ne se joue pas n’importe où. Au milieu d’un jardin partagé, ça oui, mais aussi et surtout, dans l’obscurité d’une caravane aménagée pour l’occasion. À l’intérieur : trois banquettes, installées comme des gradins, sur lesquelles prennent place au maximum une dizaine de personnes et un castelet derrière lequel prendront place les comédiens, dont seules les mains prendront la lumière pendant le temps de la représentation. 

Car ce sont bien les deux fois dix doigts de Manon Descamps et David Crevet qui sont les stars de ce théâtre de poche. Les deux artistes sont des « comédiens manipulateur » comme se décrit David Crevet, ravi de pouvoir porter cet exercice aux yeux du public dans cette configuration scénique. « C’est une petite jauge, on joue dans un écrin. Même s’il met en scène les mains, c’est un exercice de comédien, et nous avons tous les deux une pratique du théâtre d’objets. » « Cela montre que dans un espace restreint, on peut faire des choses passionnantes. On sent qu’il y a beaucoup de travail derrière tout ça« , explique Philippe à la sortie du spectacle. Jouer dans un espace si exigu est un format exigeant mais aussi libérateur pour les artistes, « Ce format apporte à la fois de la liberté et de la contrainte. C’est un langage sans parole« , analyse Manon Descamps, « Le langage des mains est universel et cela fait tomber pas mal de contraintes. On peut s’adresser autant aux adultes qu’aux enfants, mais aussi aux étrangers. »

© Clémence Leleu

Alors une fois que tout le monde est bien installé, que la porte de la caravane s’est refermée, les deux comédiens entrent en scène, laissant bientôt leurs corps disparaître derrière le castelet, laissant la part belle à leurs mains. Les doigts se font alors tantôt maniaques, lecteurs, hommes, femmes, enfants ou alors peut-être graines et légumes. La séduction s’invite, l’espièglerie aussi. L’amour, la famille, l’amitié. Chacun peut voir ce que bon lui semble derrière ce ballet digital, porté de temps à autre par la voix de Luis Mariano et de The Platters. 

« C’est très poétique, on oublie les mains, elles prennent vie, on est emporté dans l’histoire. Ça m’a fait penser à un ancien programme qui passait à la télévision, La Linéa. C’est un objet atypique. » raconte Florence, très emballée. Effectivement, les mains prennent vie et chacun leur donne la signification qu’il souhaite. « On ne s’attend pas à ce genre de spectacle dans un tel lieu. Pour moi ça représente l’évolution de la vie. Quand elle sort la petite boule de la boîte, on ne s’attend pas à ça. Et puis la musique est parfaitement choisie. Avec les mains on peut faire plein de choses et surtout on peut faire naître plein d’émotions.« , confie Maryse. Un avis partagé par Francis. « C’est poétique, inventif, c’est figuratif. Pour moi c’est une espèce de micro-auberge espagnole, c’est une caravane espagnole, voilà ! Le format est très intimiste, c’est la première fois que je vois un spectacle dans ce genre de lieu. » Lisa, 15 ans, a elle aussi beaucoup apprécié, « Je trouve ça chouette. Le fait que ce soit fait seulement avec les mains, qu’on comprenne ce que l’on veut.« 

© Clémence Leleu

Au fil du spectacle, les spectateurs et spectatrices s’amusent, s’étonnent et s’adoucissent. Puis, 20 minutes plus tard, alors que les lumières se rallument, ce ne sont plus deux mais dix paires de mains qui tapent l’une contre l’autre pour applaudir la performance du duo de ces « comédiens manipulateurs« . La conclusion reviendra à Christine, une des spectatrices de la première séance. « On ne sort pas beaucoup. On regarde plutôt des spectacles à la télévision. C’est original, ça passe vite, c’est un bon petit moment. C’est fou de pouvoir ressentir des émotions juste avec deux boules. C’est la gestuelle qui fait ressortir les émotions. On a de la compassion pour les personnages. Si on extrapole, ce sont deux enfants entre de bonnes mains.« 

Texte et photos : Clémence Leleu

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