Dans le cadre des Plaines d’été, l’artiste sonore Octave Courtin, membre du collectif L’Iliaque, a présenté à Azincourt une étonnante performance autour d’un instrument-sculpture qu’il a lui-même fabriqué. Entre musique expérimentale, arts visuels et partage avec des spectateurs, la rencontre a mêlé curiosité, surprise et émerveillement.
Le lundi 25 août 2025, dans le cadre de la programmation des Plaines d’été soutenue par la Direction régionale des affaires culturelles Hauts-de-France, un impromptu artistique s’est tenu à l’intérieur de la halle médiévale d’Azincourt, attenante au musée. Vers 15h30, le public a découvert le travail d’Octave Courtin, artiste sonore et membre du collectif L’Iliaque depuis 2023. Aux côtés de la danseuse et chorégraphe Mel Favre, également membre de L’Iliaque, il a proposé une performance singulière : un concert d’un instrument qu’il a entièrement fabriqué.




Car Octave n’est pas seulement musicien. Formé aux Beaux-Arts, passionné par la facture instrumentale, il a longtemps exploré les clarinettes et les cornemuses, allant jusqu’à créer une étonnante cornemuse à partir d’un matelas gonflable de camping. Sa recherche est traversée par une interrogation constante : le lien entre l’instrument et le corps, comment l’un prolonge l’autre. De cette démarche est né l’instrument-sculpture présenté à Azincourt, où se mêlent air, eau, tuyaux et membranes sonores.
Quand l’eau et l’air deviennent musique
Dans la halle médiévale, l’installation prend une allure solennelle, posée face à la grande cheminée. Le public s’installe, et le concert commence par un geste simple mais curieux : déverser deux gourdes d’eau dans de petits pots suspendus. Peu à peu, l’eau s’infiltre dans les tuyaux, active des clapets, ruisselle sur des cymbales et des ballons gonflables. L’air, lui, circule dans une sorte d’accordéon en acier posé sur la table, dont Octave manipule les micros suspendus pour amplifier et modeler les sons. L’instrument paraît presque autonome. Le résultat est hypnotique, méditatif, à la fois sonore et visuel.




L’audience est captivée. Beaucoup froncent les sourcils, intrigués par le mystère du dispositif, avant de se laisser happer par la douceur et la lenteur de la partition. Le concert dure une vingtaine de minutes, jusqu’à ce que l’eau s’épuise naturellement et que la musique s’éteigne.
Sortir la musique expérimentale de ses cercles
À la fin, Octave invite les spectateurs à s’approcher, à observer de près son instrument et à lui poser des questions. L’échange est chaleureux. On apprend que cette sculpture sonore, fruit de plusieurs années de recherche, est désormais achevée à ses yeux. « Pour moi, il est terminé. J’ai envie d’aller vers d’autres projets », confie-t-il.





Parmi les spectateurs, un couple, Sylvie et Olivier, s’est montré particulièrement curieux. De passage au musée d’Azincourt, ils avaient été invités à assister par hasard à la performance gratuite donnée dans la halle. Séduits, ils sont restés jusqu’au bout et ont multiplié les questions à l’artiste. Sylvie, visiblement enthousiaste, expliquait : « Je n’avais jamais vu ça, j’ai trouvé ça très intéressant, très captivant, très agréable. » Elle s’interrogeait notamment sur la suite du travail d’Octave, sur ses futurs projets et sur le caractère “achevé” ou non de son instrument-sculpture.
Octave, lui, retient surtout la richesse de cette rencontre hors des cercles habituels de la musique expérimentale : « Je sais que c’est une musique de niche. Ce qui m’intéressait avec Plaines d’été, c’était de pouvoir la faire découvrir à d’autres publics, de la sortir des lieux habituels et de susciter la curiosité. »






Il ajoute : « Dans mon travail, il y a toujours une dimension sonore et une dimension visuelle. Le visuel permet peut-être de rendre le sonore plus accessible, même à des personnes qui ne connaissent pas l’art contemporain. »
Sur l’expérience Plaines d’été, il reste très positif, tout en nuançant : « La seule difficulté que j’ai rencontrée, c’est sur certaines dates publiques, où il était plus compliqué de mobiliser les gens. Quand les dates étaient organisées par des structures ou des institutions, elles ont fait ce travail. Mais dans l’ensemble, je suis très satisfait de l’expérience. »



Aux côtés d’Octave, Mel Favre a, elle aussi, pris part à Plaines d’été. Chorégraphe et danseuse, elle a proposé des ateliers autour du souffle et du corps, en lien avec des instruments fabriqués lors d’ateliers précédents avec d’autres publics. Dans leur travail commun, la relation entre musique et corps demeure essentielle.
Avec cet impromptu, Octave et Mel auront montré comment une recherche artistique singulière peut s’ouvrir à des spectateurs non avertis, susciter l’étonnement, le plaisir et la curiosité. Une parenthèse inattendue, au cœur d’une halle médiévale, où l’art expérimental a trouvé un nouvel écho.
Texte et photos : Sidonie Hadoux