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L’infini du virtuel sur l’horizon d’une plage du Nord

Vendredi 19 septembre 2025 fut une journée incroyable. Le soleil resplendissant a réchauffé les cœurs et les os. À la sortie de l’école et du bureau, direction la plage. Certain·es se sont baigné·es. D’autres ont joué. Tous·tes ont savouré ce petit supplément de légèreté. Et pour finir en beauté, sur la digue de Leffrinckoucke (59), un impromptu intitulé Idea[L] interprété par la compagnie Aubette Collective, était offert dans le cadre des Plaines d’été soutenues par la DRAC Hauts-de-France.

Les bancs disposés devant une installation de barres métalliques, de machines électroniques, d’enceintes et de câbles n’ont pas manqué d’attirer la curiosité des passant·es. « Il va se passer quelque chose ? C’est pour tout le monde ? On peut venir ? » Le public comptait également des personnes ayant noté ce rendez-vous à ne pas manquer.

Idea[L] débute. Antonin Carette à la basse et Caroline Chaumont au multitruc à boutons rotatifs et poussatoires. Ambiance musique coldwave. Puis les enceintes lancent une toute autre musique. Celle d’un zapping web concocté spécialement pour ce programme. Des extraits de films, d’interviews, de vlogs, de vidéos virales, etc. Bandes-son sur lesquelles Caroline Chaumont s’adonne au lip sync dansé. Qu’est-ce donc que ça ? Une sorte de mime visant à reproduire l’articulation d’une parole émise par une bande-son mais aussi à l’incarner par une gestuelle. C’est une discipline dans laquelle Caroline Chaumont excelle. Elle hypnotise l’audience avec ses incroyables mimiques en parfaite osmose avec les extraits diffusés mais également avec l’engagement de son corps. Tour à tour elle donne vie à de nombreux personnages divers.

« J’ai adoré ! lance Clémence, 40 ans, d’un air rieur. C’est résumé, hein ? Oui, il me faut plus de temps pour savoir comment verbaliser les choses. Je n’ai pas eu le temps de travailler ma critique mais en tout cas c’était trop bien de voir un spectacle ici. J’habite à l’autre bout de la digue, au Grand Large (Dunkerque). J’ai beaucoup aimé la musique, la danse, la performance, les montages-son. Et l’installation scénique. »

Pour Sophie, 48 ans, aussi ce fut un ravissement d’assister à un spectacle sur la digue et de prolonger l’instant en discutant alors que le soleil se couche dans une explosion silencieuse de rose envoutant. « C’était trop trop bien ! Le moment et l’endroit parfaits. Ça fait du bien de voir ce type de formes dans un lieu ouvert à tous, accessible à tous. C’est gratuit, en extérieur. Ça fait un bien fou ce mélange de danse, de musique, de théâtre. J’ai l’habitude de voir des spectacles, des concerts et des expo. Ça fait partie de mes centres d’intérêts perso. Et j’avais envie de voir ça. Je les connais mais je serais venue même sans ça. »

Pour la conception de cet impromptu, Caroline Chaumont et Antonin Carette ont été inspirés par les œuvres d’Alain Damasio. « Surtout par La Vallée de silicium dans lequel il interroge notre rapport au monde numérique. Nous n’avons pas pensé notre impromptu avec la volonté d’être didactique mais plutôt comme un terrain de jeu, d’expérimentation. Même si nous aimerions le développer pour le proposer aux collégiens et aux lycéens et ouvrir un débat avec eux. Il y a beaucoup de réf. Si le public ne les a pas, ce n’est pas grave. En amont, on a fait beaucoup de recherches. » Le volume de la matière première est considérable. « C’est assez abyssal, poursuit Caroline Chaumont. Je me suis vite rendue compte que plus on a une quête précise, plus on se perd et au final, en se laissant porter, on a trouvé ce qu’on cherchait. En se laissant emmener par les algorithmes. »

Puis il y a eu le montage. « On voulait un petit fil narratif. S’autoriser un zapping comme quand on scrolle et qu’on passe d’une image à l’autre avec des thèmes très variés. Je trouvais intéressant et pertinent, pour cette petite forme qui parle des réseaux sociaux, ce truc du lip sync dansé. Car sur internet, souvent, on ne sait pas qui parle, en fait. Il y a une perte d’identité avec le paraitre. »

Antonin Carette a beaucoup apprécié se produire sur la digue. « J’aime jouer dans des lieux hyper variés, où on est pas forcément attendus. Avec des publics différents. Ça nourrit aussi la performance. »

Texte et photos : Gaëlle Martin

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