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La bibliothèque des îles

Une table gravée comme une cartographie imaginaire, des poufs de bois, des coussins, quelques fanions qui flottent dans le vent… Vendredi 22 août, dans le parc d’Houlouve à Wimille (62), Quentin Conrate et Madeline Wood ont déplié leur bibliothèque itinérante dans le cadre de Plaines des tentes – pleines détente, une programmation soutenue par la Direction régionale des affaires culturelles Hauts-de-France.

La collection est patiemment rassemblée depuis 2021 : plus de 250 ouvrages consacrés aux îles, réelles ou rêvées, habitées, désertées, ou métaphoriques. Tout a commencé par un voyage en Islande, puis à la Réunion. Madeline en garde le souvenir d’une révélation : « il s’est passé quelque chose de magique ». Plus tard, elle rejoint Quentin lors d’une résidence en Irlande, et lui transmet sa fascination. De là, naît un cycle de recherche et de création autour des îles, qui les emmène du livre à l’installation, du spectacle à la performance.

La bibliothèque est l’une des formes de ce cycle. Au départ, il ne s’agissait que d’un coin lecture installé à côté d’une exposition. Trop discret. Les visiteurs passaient sans s’arrêter. Alors Madeline et Quentin ont décidé d’inventer un temps à part : convier les gens à s’asseoir, à échanger des souvenirs d’îles, à lire à voix haute des extraits aimés. Depuis, cette bibliothèque est devenue itinérante. Après trois campings dans le cadre de Plaines détente, elle s’est posée hier sur l’herbe du parc d’Houlouve, à Wimille, pour leur quatrième impromptu.

Face au kiosque « Le 8000 », entre terrain de pétanque et jeux d’enfants, les promeneurs passaient. Beaucoup sont restés du côté des balançoires, mais quelques curieux se sont approchés. Une dame, d’abord hésitante, s’est laissée happer par la lecture de Madeline, avant de s’asseoir quelques instants. Une autre, venue avec sa fille, a salué l’idée avec enthousiasme. Quentin, lui, parlait de chaque livre comme d’un ami : un titre, une couverture déclenchaient une anecdote, une envie, un partage. Dès qu’un livre est ouvert, il s’anime, raconte ce qu’il y a découvert, donne envie d’y plonger. On repart avec l’impression qu’il faudrait lire toute la collection.

Thé chaud et glacé, soleil doux et vent léger : l’espace, chaleureux, donnait envie de s’attarder. « Pour nous, explique Quentin, c’est le processus de création qui compte plus que le résultat. » Et ce processus, ici, s’invente dans la rencontre, même fugace, autour d’un livre.

Pour accueillir les lecteur·ices, les livres sont posés sur une table gravée comme une carte. Sur les lignes tracées dans le bois par Madeline, se dessine l’empreinte d’une île imaginaire. Autour, des coussins, des poufs de bois, mobilier façonné à la main : tout concourt à une hospitalité délicate. Ici, le geste artistique n’est pas de présenter une œuvre finie, mais de rendre visible un processus, une recherche en mouvement. Un archipel d’histoires qui se déploie à la mesure des rencontres.

La bibliothèque des îles, elle, poursuit sa traversée. Après Wimille, cap vers Berck-sur-mer, sur la digue, pour ouvrir à nouveau ses horizons de papier. La plage appelle à la lecture, les visiteurs et visiteuses furent plus nombreux à venir se délecter des mots des îles, comme pour palier à leurs absences dans l’horizon azur de la cité balnéaire.

Texte et photos : Sidonie Hadoux

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