Je vous écris pour vous raconter « Le landau postal » cet impromptu emmené par Valérie et Anne-Cécile, du collectif Face à Face. Toutes deux comédiennes, elles ont choisi l’Abbaye de Chiry-Ourscamp, dans l’Oise.
Le temps était parfait, le soleil illuminait les jardins de l’abbaye cistercienne, dont les arbres permettaient de s’abriter un peu de la chaleur ambiante.
L’idée du Landau postal est venue à Valérie après un constat : dans les boîtes aux lettres aujourd’hui s’entassent surtout factures, publicité et parfois, une petite carte postale. Le duo propose donc au public une performance très brève, suivie du cœur du projet : un atelier d’écriture, qui permet de vivre avec les participants, la naissance d’une correspondance. D’où l’idée du landau.
Laissez-moi donc vous raconter tout d’abord le spectacle : Anne-Cécile et Valérie, habillées d’un costume, chemise et cravate, se griment en employées du service du courrier trouvé ou perdu (selon que vous voyez le verre à moitié vide ou à moitié plein) après quelques déconvenues : l’une se rêvait reine de l’aéropostale, elle a le mal des transports. L’autre factrice à dos de licorne, elle est allergique au poil de chevaux. Alors, pendant une dizaine de minutes, elles ouvrent et déclament les contenus des lettres arrivées entre leurs mains, avant d’inviter le public à prendre la plume et à écrire à un être cher, un·e voisin·e, voire même, pourquoi pas, à soi-même.
Pour rendre les choses plus engageante, certain·e·s pouvant être parfois impressionné·e·s par le fait d’écrire une lettre, les artistes ont amené leurs plus belles fournitures : stylos plumes, feutres, rubans adhésifs colorés, paillettes, papiers à lettres stylisés et même des petits blocs de cire multicolores à faire fondre pour cacheter son enveloppe d’un sceau, comme au bon vieux temps.
Gisèle, institutrice retraitée, Janine, professeure d’anglais, également à la retraite et Arnold, en CE1 et les cheveux parés d’une belle plume de poule se sont prêtés au jeu. Sans vouloir trop être indiscrète, j’ai quand même demandé à qui chacun allait destiner sa missive. Gisèle à son fils Adrien auquel elle a oublié de souhaiter la fête, Janine à Arnold qui fête bientôt son anniversaire et Arnold à Lou, son amoureuse depuis la maternelle, même s’il n’est pas encore tout à fait sûr que l’affaire soit réciproque.
Le trio fut le seul public de cet après-midi, l’abbaye étant un peu reculée et les frères et pères n’ayant pas voulu se prêter à l’exercice. « Peut-être que l’écriture ça fait peur » à envisagé Gisèle. « Moi ça fait bien 15 ans que je n’avais pas écrit comme ça. Avec un stylo plume et avec application. »
Arnold a lui aussi beaucoup aimé l’exercice, surtout le spectacle « c’était très drôle. Et puis quand Lou recevra la lettre, j’espère qu’elle sera contente. » « C’était très sympa et très original, ça fait du bien de prendre le temps des choses. Aujourd’hui tout se passe par SMS ou par mail », conclut Janine. « On a bien fait de venir ! »
Alors bien sûr, je ne vous cache pas que Valérie et Anne-Cécile étaient un peu déçues de ne pas rencontrer plus de public. Celles qui se disent attachées aux mots avaient imaginé que ce lieu religieux, avec toute sa symbolique, notamment concernant l’écriture, aurait constitué un bel écrin pour la première de ce spectacle. Mais la poésie était là, je vous l’assure, lecteurs et lectrices. Le duo prévoit de rejouer cet impromptu une nouvelle fois alors si l’envie d’écrire une petite lettre vous tente et que vous êtes dans le coin, cela se passera à la Maison des Faiseurs à Groffliers dans le Pas-de-Calais.
D’ici là, Arnold, Lou et Adrien auront reçu leurs lettres qu’Anne-Cécile et Valérie se sont engagées à poster. Et au pire, si vous n’êtes pas dans les parages, pourquoi en profiter, même sans l’impulsion du spectacle, pour écrire une lettre à une personne qui vous est chère ?
Bonne rentrée, Clémence Leleu