Au cœur du quartier de Wazemmes, au bout de la rue Jules Guesde à Lille, on trouve les locaux de l’Espace Citoyen, Iris Formation, au rez-de-chaussée d’un îlot de H.L.M. Cette association accueille depuis une dizaine d’années des personnes sans emploi en quête d’avenir ou simplement de réconfort, jeunes et vieux, gens venus d’ailleurs, femmes avec enfant(s), qui trouvent ici des formateurs, des psychologues, des conseils de toutes sortes, santé, culture, diététique… Mais surtout un pôle associatif vivant et militant où se rencontrer et fonder des projets.
On est mardi, jour de marché, et il faut se faufiler jusqu’au centre et trouver un endroit commode où décharger nos valises. Accueil chaleureux de Lila et son équipe. Elle ne sait comment nous remercier pour ce « cadeau » qu’on leur fait aujourd’hui. Il fait un temps radieux et il y a une jolie terrasse en caillebotis qui donne sur la rue, terrasse réalisée par les bénévoles de l’association. Pourquoi ne pas installer dehors, nous propose Lila, ça fera peut-être s’arrêter quelques curieux. Nous sommes d’accord.
Parmi les 25 valises de l’exposition, nous en avons choisi 7, les plus parlantes, car toutes les valises s’entrouvrent sur des histoires, histoires de vie, de joies et de peines, de voyages et d’exils. Toutes sollicitent des confidences et des souvenirs.
Nous avions rencontré brièvement Lila, il y a quelques années, à l’occasion d’un travail d’écriture à la Cimade avec des personnes migrantes, et nous étions venus ici rechercher des lectrices pour les beaux récits écrits par ces demandeuses d’asile. Et voilà que parmi les spectateurs venus aujourd’hui voir l’expo, il y a Aïssatou. Nous nous reconnaissons. Elle était une des personnes rencontrées à l’époque, arrivée depuis peu en France. Que de chemin parcouru ! Elle dirige maintenant une association pour la reconnaissance et la visibilité des femmes africaines au quotidien.
Les valises sont vraiment appropriées pour cette rencontre. Une douzaine de personnes assistent à la visite guidée. Elles ont toutes le point commun d’avoir vécu un exil et d’être intégrées maintenant dans la vie associative et la transmission. L’écoute est en même temps attentive, émue et amusée : Les valises parlent. Et les gens, en miroir, parlent à leur tour, racontent d’où ils viennent (Sénégal, Mali, Kabylie, Djibouti, Suède, Algérie…), et racontent souvent des histoires, somme toutes heureuses, de reprise en main de leur destin.
Assez vite installées et démontées, les valises se prêtent bien, finalement, à l’art de l’impromptu. Mais là encore les gens du quartier ne sont pas descendus de leurs immeubles pour s’approcher des valises, pourtant l’installation est intrigante et attire l’œil. Il est vrai que la ruelle était déserte sous ce soleil caniculaire.
Compagnie l’Emporte Pièces par Violaine Burgard et Bernard Sultan.