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Carnet d’impromptu #1 de la Compagnie l’Emporte Pièces

  • Nord

Notre agenda s’est rempli à toute vitesse. Ce n’est pas étonnant. Nos interlocuteurs ne dédaignent pas cette offre d’un impromptu artistique gratuit. Ils sont même passablement étonnés. On dirait qu’ils regardent derrière eux pour savoir si c’est vraiment à eux que l’on s’adresse.

Nous commençons par contacter deux associations de solidarité : L’Ile de la Solidarité et Iris Formation. Ce sera une première pour eux. Ils brassent un public de personnes très démunies. A l’Ile de la Solidarité, on jouera à 10h, après le petit déjeuner offert aux personnes en difficulté sociale. Quel impromptu se prêterait le mieux à ce public ? On va essayer les « Valises contées », et puis selon comment ça se passe, on lancera une discussion avec les gens sur les aléas de la vie (qu’est-ce qu’ils mettraient, dans leur valise, pour parler d’eux) ; mais on apportera aussi de quoi faire le « Fil rêveur », si on a le temps et que l’ambiance s’y prête.

Même programme à Iris Formation, où le public est essentiellement féminin (femmes sans emploi, le plus souvent seules avec enfant(s)).

À Superquinquin, supermarché associatif, derrière la boutique, il y a un grand jardin. Pourquoi ne pas s’y installer pour faire une lecture de « La Botte à Nique »* ? Rendez-vous est pris, mais finalement reporté en septembre car leur planning est trop chargé.

Alors, allons faire la même proposition au « Biglemoi », la nouvelle librairie de la place Degeyter, à Fives. J’aimerais bien y présenter « L’Amant Universel », mais c’est destiné à un public averti, et donc le soir, ce qui n’est pas commode. Ils choisissent Dubuffet (la Botte à Nique), le 24 juin à 18h. Ce sera donc notre premier impromptu.

Les autres dates se remplissent : « L’Amant Universel » à la médiathèque de Lecelles, « Mon jardin » à l’école maternelle La Fontaine, la « Botte à Nique » et le « Carnet-Jardin » au jardin partagé des Saprophytes ; le reste en septembre : « Pluie d’encre » à Rosult, quatre « Conférences-paysages » à Lomme et Denain et les « Valises contées » au Pays de Mormal, en EHPAD et ADACI.

Ce qui fait 14 impromptus programmés pour l’instant.

24 juin. La Botte à Nique à la librairie Le Biglemoi.

La lecture doit se faire en extérieur sur la place, devant la façade de la librairie. Mais le temps est menaçant et doit tourner à l’orage. Que faire ? A tout hasard Bertrand, le libraire, installe des chaises à l’intérieur pour avoir une solution de repli.

Une installation d’objets rouges au sol, sur le parvis, devant les chaises rouges du Bigle Moi va-t-elle attirer les regards et la curiosité des badauds ? Non ; c’est trop demander. Il y a un mur invisible entre les familles assises sur les bancs à deux pas et l’espace intimidant de la librairie. Quelques enfants roms viennent parler avec nous, intrigués et attirés par les objets rouges, mais respectueux de notre espace.

Notre public, finalement, se compose d’une dizaine de personnes, dont des clients de la librairie qui sont restés. (« ça ne dure pas longtemps »). La pluie prévue interrompt la lecture une minute, le temps de se rabattre à l’intérieur. La lecture, véhémente et volontairement hachée, capte l’attention. Les gens restent ensuite volontiers pour discuter de Dubuffet, de l’art, des activités de la compagnie et du programme des Plaines d’été. Plusieurs se promettent d’aller voir sur le site les autres impromptus proposés.

* Quelques mots sur « La Botte à Nique » :

En 1973, Jean Dubuffet écrit ce livre-manifeste. Dans une écriture libérée de toute règle, il y évoque la folle prolifération de la nature, dans une sorte d’équivalence entre la poussée anarchique des plantes et le fonctionnement débridé de la pensée créatrice. Ce faisant, il prend fait et cause, lui le promoteur de l’Art Brut, pour l’art des marginaux, des malades mentaux et de tous les « non-conformes », comme un plaidoyer pour la différence et l’altérité. Un « art des simples », comme on nomme les herbes potagères et les simples d’esprit.


Compagnie l’Emporte Pièces, par Violaine Burgard et Bernard Sultan.

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